Le Gardien m'avait vu arriver. Alors que ses mains chatouillaient les flammes vertes de l'éternel brasier, son masque de bois et les lumières qu'il renfermait s'étaient tournées vers moi.

- Vous n'y êtes pas allé de main morte avec le prince ! J'en garde un souvenir peu ragoûtant. Chaque rediffusion me donne la nausée. Souvent, je me vois obligé de couper avant la fin.

- Menteur ! répliquai-je. Je suis sûr que vous êtes du genre à succomber à la fascination morbide. Vous qui, avec votre expérience, avez dû en voir des plus vertes et des moins mûres encore.

- ...C'est pas faux.

Je m'arrêtai à sa hauteur, amusée par notre petit échange.

- Je sais aussi que vous êtes content de me voir. Votre masque dissimule votre visage aux yeux de tous, c'est un fait, mais j'ai pu voir les vôtres s'illuminer à mon approche~

Comme perturbé par ma remarque, il reporta vivement son attention sur les flammes en ramenant les mains dans le dos.

- Euh... Je...

L'air amicale, je penchai légèrement la tête de côté en croisant moi aussi les mains dans le creux des reins.

- Qui ne nie pas consent ! Mais il n'y a aucune honte à savoir, vous savez ? Je trouve que je suis plutôt bonne à vivre~ dis-je en me fendant d'un plus grand sourire. Mais trêve de palabres, Gardien ! J'ai bien envie de faire sonner les clairons à l'annonce d'un combat royal !

D'un mouvement de main en direction des flammes à la couleur surnaturelle, je les fis s'agiter de façon spectaculaire. La Gardien Intemporel recula vivement la tête mais sans pousser le moindre cri de surprise.

- Royal ? répéta-t-il en ramenant son regard luminescent sur moi.

- Absolument ! Mes cibles du jour sont toutes désignées - votre « petite » liste m'est restée en tête.

- Attendez une minute..., fit-il en agitant un index devant son masque. Laissez-moi deviner : après le prince, voilà que vous envisagez maintenant de taper sur le paternel !

- Oui ! m'exclamai-je, excitée comme une puce, les poings serrés contre ma poitrine.

Je m'interrompis toutefois pour déplier un index à son attention :

- Mais ce n'est pas tout : je veux aussi affronter Monsieur Baddack~

- « Monsieur » ? s'enquit le Gardien. Vous me donnez la curieuse impression de le connaître...

- C'est bel et bien le cas ! Il est venu sur Terre, nous avons combattu des morts-vivants et un nécromancien ensemble, et je ne l'ai jamais plus revu depuis notre dernière rencontre.

- Vous vous sentez nostalgique ? Sachez qu'il ne vous reconnaîtra pas dans cette temporalité que je vais créer.

- Vous ne m'apprenez rien, même si c'est gentil à vous de me prévenir, répondis-je en baissant la main.

- Résumons : vous souhaitez donc vous confronter au Roi Végéta et à Baddack ?

- Vous avez tout compris~

Sous le masque de mon interlocuteur, je crus reconnaître l'éclat de la malice.

- Pour un petit billet de plus, vous pouvez avoir droit à une surprise, me proposa-t-il. Ça vous tente ?

- Dans le cas où ça pimenterait l'évènement, j'en suis ! Sinon je passe.

- Je me porte garant de votre satisfaction, m'assura-t-il avec une petite courbette. Et puis... le client est roi, à ce qu'on dit.

- Tout à fait! Surtout quand il paye bien, en temps et en heure, ajoutai-je tout en lui fournissant de tête l'argent nécessaire à mon exutoire du jour. Le compte est bon ?

- Il y est, dit-il après avoir vérifié et rangé ses gains. Je vous souhaite une excellente rencontre.

J'eus de nouveau droit à son petit rituel avec les flammes dansantes qui, très vite, me rendirent la tête légère avant...

...de me transporter dans un tout nouveau monde où la gravité était plus importante que celle de la planète Terre. Mais tout comme dans les montagnes rocheuses, la végétation laissait fortement à désirer ici. Une terre presque brûne s'étendait sous mes pieds, et par-delà ses limites - pas si éloignées de moi pour le coup - une surface métallique et hautement technologique me faisait de l'oeil. L'énorme bâtiment qui en était constitué me laissait béâte d'admiration. Il se trouvait vraisemblablement au sommet d'une falaise - au bord du vide donc. Des tours magnifiquement ornées s'élevaient de l'édifice et, quand on se tenait à son pied, forçaient le regard à se lever bien haut pour en voir la pointe.

- C'est sans aucun doute la demeure d'un roi, soufflai-je, encore et toujours fascinée.

- Hé, toi ! m'interpella une voix qui m'était familière.

La surprise me laissa sans voix. Cette longue chevelure noire et hérissée qui lui arrivait jusqu'à l'arrière des cuisses et ce regard sérieux...
C'était Radditz ! Un peu plus jeune que ceui queje connaissais mais on ne ouvait pas se méprendre.

- Qu'est-ce que tu fais à révasser devant les portes du palais du roi ? Mais... pourquoi tu n'as pas de queue de singe ?! ...Et ces cheveux bizarres... Tu serais une intruse ?!

Il se braqua ausitôt tandis que, soudain intriguée, je baissais mon regard sur ma tenue qui étrangement ne me paraissait plus aussi ample au niveau des manches...

- Oh... où est passée ma jupe ?! Et mon épée aussi a disparu, tiens  ?

Je réfléchis à toute vitesse ; je n'avais ni payé pour rencontrer Radditz, ni dépensé des sous pour me retrouver dans une tenue de combat utilisée par les saiyans !
Mais alors pourquoi je... ?

- Ah ! tiltais-je enfin. La fameuse surprise à 100 zénnies, c'est donc ça...

Je méditais encore sur cet imprévu quand Radditz me bouscula rudement avec la paume de la main.



- Oh ! Je te parl-UuuaaRrRgh !

J'avais agi par réflexe - merci à ma petite expérience militaire - ; d'une rapide clef de bras, je le forçai à poser genou à terre.

- Soyez gentil avec les filles, Monsieur Radditz, lui recommandai-je avec autorité. Ah ! Et profitez-en pour me dire ce que VOUS vous faites ici. Et ne me dites pas que vous gardez ces portes, je ne vous croirais pas.

- Aarrh... Merde ! C'est quoi cette force ?!

Mais même dans cette position, il ne se laissa pas faire ; sa main libre se mit à irradier de Ki, qu'il fit passer au-dessus de sa tête avant de me tirer un kikoha ! Je n'eus qu'à bouger la tête pour éviter de la perdre tandis que la sphère d'énergie détonna contre les doubles portes que son prétendu gardien était censé protéger.
Je lui tordis le bras dans le bas du dos, prête à infliger une méchante torsion à son poignet.

- Belle gaffe, Monsieur Radditz ! Et la prochaine pourrait bien vous coûter un bras. Répondez à ma question où bien la sentence sera identique.

- Hrrrggh... J'ai pour ordre de garder ces foutues portes, que tu me croives ou non !

- Difficile de vous imaginer aussi servile, rétorquai-je tout en le relâchant. Venant de vous, je m'attendais à mieux. Enfin... il semblerait que la tâche ne vous tienne pas à cœur étant donné le trou que vous venez de faire dans vos magnifiques protégées.

- Q-Quoi ?! Non, c'est pas vrai !

Il se retourna vivement afin de déplorer les dégâts. Se faisant, désespéré, il se prit la tête en les mains.

- Les autres vont me tuer pour avoir fait ça !

J'esquissai un petit sourire amusé suite à cette replique. Son regard bascula sur l'index que je venais de lever.

- Je peux vous proposer un marché, Monsieur Radditz ; vous me montrez ce dont vous êtes capable au cours d'un combat à la suite duquel, si jamais vous sortez vainqueur, vous me présenterez à vos supérieurs comme la coupable et j'approuverais. Mais si d'aventure vous venez à échouer, alors vous serez forcé de me suivre comme un bon valet le ferait, ce jusqu'à ce que vous me guidiez jusqu'à la salle du trône où je rosserai votre roi.

- Tu te crois vraiment capable de soumettre le Roi Végéta ?!

Je rejetai les cheveux en arrière avec une certaine assurance.

- J'ai déjà écrasé son fils et son second - Nappa - dans une autre temporalité alors j'ai jugé bon d'aller défier son paternel dans celle-ci.

Il avait l'air franchement abasourdi.

- Je n'en crois pas mes oreilles... mais cette histoire est ridicule ! s'insurgea-t-il en me pointant du doigt. Tu n'es même pas des nôtres et tu prétends avoir fait la peau au prince et à son garde du corps ?! Pff ! OK. Va pour ton marché. Je vais te faire ravaler ton sourire et tes paroles, vermine inconsciente !

Suite à son petit discours, il se mit en garde, la mine renfrognée et les poings serrés.
Bien ! Parfait ! Le voilà qui avait mordu à l'hameçon~
Je fis donc de même, une main détendue à hauteur des jambes tandis que l'autre me frôlait la joue du bout des doigts, paume tournée vers l'extérieur. Pour battre un Radditz de mon niveau, il allait me falloir user de stratégèmes tout en exploitant autant de ma technique que de ma vitesse.
Alors que Radditz m'observait, je fendis l'air avec plusieurs signes de le main. Le « B » de Berkano produit sa lueur verdâtre avant de virer au mauve quand il s'imprima sur le dos de ma main gauche.
En voyant ça, mon adversaire fronça les sourcils.

- Je ne sais pas ce que tu mijotes mais tu ne m'auras plus par surprise. HAAAAA !

Il fondit sur moi en hurlant, toute aura déployée !
Ses gestes étaient rapides mais guère assez pour me surprendre - ceux du Maître étaient décidément d'un tout autre niveau et d'une précision plus terrible encore. Par contre, la gravité me gênait un peu aussi dus-je parer les coups le temps de m'y accomoder. Néanmoins le processus d'acclimatation ne fut pas bien long, l'absence du poids de ma Tenue en Tisse-Rune y aidant beaucoup.
Alors que je reculai en contrant coup sur coup, je finis par en recevoir un entre les côtes. Je me tordis en deux avant de comprendre que la suite allait s'avérer autrement plus douloureuse : un upercut à hauteur du menton !
Je dus me reculer brusquement pour éviter d'en faire les frais, ce qui ne le surprit pas autant que le coup de pied qui le cueillit juste au-dessus du genou. Sa jambe ploiya sous son poids quand il voulut prendre appui dessus, mais cela ne l'empêcha pas de se focaliser sur moi. Il voulut me frapper du tranchant de sa main et je me fis fort d'utiliser son élan à ses dépends en déviant le coup !
A son contact, une petite lueur verte se propagea dans l'air pour s'éteindre aussi vite qu'elle était apparue.
Je m'écartai en pivotant à demi sur un pied pour le regarder chanceler vers l'avant.

- Votre jeu de jambes laisse à désirer. Si vous voulez mon avis : tout ça, ça manque de souplesse.

- Arrête de jacter !

Après avoir tourné la tête dans ma direction et s'être stabilisé, il tendit la main en arrière pour me tirer un rayon de Ki. Sa puissance n'ayant rien de fantastique, je répondis par une attaque tout aussi basique. Quand l'explosion eut lieu entre nous et interrompit notre joute, j'utilisai le Shunkan Ido pour apparaître dans le dos du Saiyan.

- Où est-elle passée ?! grogna-t-il quand la fumée et la poussière eurent disparu.

- Juste ici~

Par le biais de la Télékinésie Zélodienne, je l'envoyai paître d'une simple impulsion. Il se réceptionna sur les mains, manifestement plus doués avec ses dernières qu'avec ses pieds.

- Espèce de... !

- Faites bien attention à ce que vous allez dire.

Je claquai des doigts en indiquant du bout d'un index sa main gauche.
A sa grande surprise, la magie végétale que j'y avais apposée lors de notre dernier contact se mit à éclore ! Pareil à une toile d'araignée, le lierre s'étendit au point de faire de lui son prisonnier. Je savais bien que ça n'allait pas durer mais c'était juste ce qu'il me fallait pour placer mon prochain coup.
En écartant violemment les bras, Radditz fit jaillir son aura de plus belle ! Il brisa alors ses chaînes au prix d'une garde complètement ouverte.

- Nous y voilà~

Je décollai du sol pour lui foncer dessus comme une torpille !
Ses yeux s'arrondirent au moment où il se rendit compte de notre trop grande proximité.
L'aura qui m'enveloppait s'opposait durablement à la sienne.

- M-Merde !

En un mouvement circulaire, je lui balançai mon coude en travers du bras gauche - suffisament fort pour le lui neutraliser durant la minute qui suit. Il jura une nouvelle fois pendant que je tournais sur moi-même tout en bondissant. Pa réflexe, il voulut lever le bras pour contrer mon coup de pied circulaire mais n'y parvint pas. Son visage accusa le choc, projeté sur la droite.
Il dut reculer d'un pas pour conserver ses appuis.
Je retombai au sol.

- Et le bouquet final...

Je tendis les doigts de ma main gauche en invoquant la gangue tranchante du Discidium.
A l'aide d'un enchainement de coupes fines millimétrées, je réduisis l'armure sombre de Radditz en plusieurs morceaux qui se sépararèrent une à une de son impressionnante stature.
Il ne lui restait plus que ses gants, ses bottes et son caleçon moulant. Le bras plié devant moi et la Lame de Ki à quelques centimètres de mon épaule, je lui adressai un clin d'oeil amusé.

- Discidium ! soufflai-je victorieusement. Epluché comme une orange~

Bouche-bée, Radditz se laissa choir sur les fesses. Il se rattrapa avec ses mains de sorte à ne pas finir étaler sur le dos.

- Vous avez perdu, lui annonçai-je tout en lui tendant la main.

Il déglutit avant de baisser les yeux dessus. Son regard se fit alors plus dur.

- Oui, et alors ?!

Il la repoussa et se remit debout tout seul.
...Comme un grand garçon ? Cette remarque me chatouillait la langue.

- Ce sera pas la première fois, de toute façon, ronchonna-t-il en se massant la joue.

- Peut-être. Mais je sais qu'au fond de vous, vous avez les capacités de progresser.

- Pfeuh ! Et c'est pour ça que tu ne m'as pas tué ?

Je lui fis un petit sourire.

- Je vous aime bien. Et plus encore j'aime ce que vous pourriez bien être amené à devenir... Enfin, bref ! J'en ai trop dit. Nous avions passé un marché, Monsieur Radditz, vous vous souvenez ? Si je gagne - et j'ai gagné ! - vous...

- Ca va, je le sais. Inutile de me le rappeler, me coupa-t-il. Je ferai ce que je pourrai pour te guider auprès du roi... C'est toujours mieux que de servir de chien de garde pour Sa Majesté, persifla-t-il, en articulant bien les deux derniers mots.

- Impeccable ! Alors en route, camarade. ! Le roi va en avoir pour son trône~

Bien qu'il ne m'intéressait pas le moins du monde de le conserver.

Nous débouchâmes dans une longue galerie après avoir évité le gros de la garde. Je talonnais Radditz depuis un petit moment déjà, parfois même en trotinnant - principalement en raison de la différence de taille entre nous et nos foulées. Mon guide se baladait en caleçon moulant et ça n'avait pas du tout l'air de le gêner, pas plus que l'échymose que je lui avais infligée au niveau de la joue gauche. Je lui avais bien proposé de le soulager de cette plaie à l'aide de ma magie mais il avait laissé s'exprimer son orgueil et refusé mes soins...
Alors que nous évoluons sur un interminable tapis rouge bordé par une tout aussi interminable succession de piliers, une voix on ne peut plus familière nous parvint :

- Qu'est-ce que vous faites ici, tous les deux ?

Elle provenait d'en face, et son propriétaire, d'abord immergé dans la pénombre, pénétra dans la lumière et s'avança vers nous sans avoir l'air particulièrement pressé. Je reconnus Baddack autant grâce à sa coiffure ébourriffée si atypique que par la cuirasse qu'il portait.
Je remarquai que lui et Radditz se regardaient en chien de faïence.

- Et surtout qui vous a permis d'entrer ? C'était trop te demander de garder une simple porte, Radditz ?

Le concerné ne répondit pas. Au lieu de ça, il se contenta de hausser les épaules et de détourner les yeux.

- Tcheuh ! fit Baddack, visiblement exaspéré par l'attitude de mon compagnon de route. Pathétique. Tu dois forcément tenir ça de ta mère...

Je vis le regard de Radditz s'embraser et son poing droit se serrer. Cependant, sa colère contenue n'alla pas plus loin que ça. Bien que révoltante de mon point de vue de spectarice, c'était une attitude avisée venant de lui.

- Quant à toi, continua Baddack en fronçant les sourcils à mon attention. On peut savoir ce que tu es ? A ma connaissance, Il n'existe aucun Saiyan sur cette planète qui a les cheveux de cette couleur. Pas plus qu'il existe des membres de notre race qui ne portent pas de queue de singe.

Le regard de Radditz s'était tourné vers moi. Lui aussi se demandait bien ce que j'étais.
Je haussai les épaules à mon tour avant de sourire le plus poliment possible, ce malgré la tension que mon interlocuteur créait à lui seul.

- En quoi est-ce si important, Monsieur Baddack ? Et poser trop de questions revient à noyer la première sous les dernières ! Laissez-moi donc vous éclairer sur la plus intéressante, fis-je en tapotant le dos de mon Radditz de compagnie, qui émit un bref grognement. J'ai vaincu votre fils aîné et je compte bien vous battre vous aussi~

Dans un silence de cathédrale, il me toisa un instant sans piper mot comme pour m'étudier, puis son regard bascula de nouveau sur Radditz dont les machoires étaient cripsées.

- Tu m'as l'air bien informée sur moi... Je me demande pourquoi, commenta-t-il sans cesser de cribler du regard son fils. Mais je ne suis pas du genre à dire non à un combat - même si le défi sort de la bouche d'une petite aliénée. Ceci dit j'aimerais bien comprendre une chose, Radditz.

Il le saisit par le menton et lui tourna la tête sans ménagament aucun, de sorte à obtenir un bon visuel sur sa joue meurtrie.

- C'est vraiment elle qui t'as fait ça ? s'enquit-il avec un sourire en coin particulièrement vicieux. Humpf ! Tu mérites bien ton petit surnom - celui de Faible avec un grand F.

- Lâche-moi, bordel ! rugit son fils, vexé par le geste.

Il repoussa la main de Baddack d'un revers de la sienne.

- D'accord, dit Baddack en ignorant la rébellion de Radditz. Je n'ai pas besoin d'en apprendre davantage. Ici ça fera parfaitement l'affaire, décida-t-il en me balançant un regard en coin plein de défiance.

- Vous en êtes sûr ? Non parce que le palais risque de prendre une sacrée baffe !

- Ca lui fera les pieds à notre roi oisif, sourit mon adversaire goguenard qui se mit en garde.

- Alors qu'il en soit ainsi~

Je fis de même non sans inviter Radditz à s'écarter de nous.

- Je risque d'avoir besoin d'espace.

Avant de se reculer, le regard tourné vers Baddack il ne put s'empêcher de me glisser à l'oreille :

- Je sais que tu ne me dois rien mais... fais-moi le plaisir de lui rabattre son caquet !

Songeuse quant à la relation que les deux protagonistes entretenaient, je le regardai tourner les talons. La vie ne devait pas être facile tous les jours pour la mère de famille !
Puis je me tournai vers Baddack, prête à la confrontation.

- On y va ! déclara-t-il de façon subite.



Sa vélocité avait largement de quoi surprendre.
Il me décocha une droite que je parvins tout juste à bloquer avec la paume de ma main gauche, puis enchaîna sur un autre coup de poing avec sa main opposée. Ce coup me frôla la joue à tel point qu'il me l'entailla.
Je lui rendis la politesse avec un coup de pied fouetté à hauteur du visage, qu'il évita en reculant la tête. L'échange continua en une série d'esquives et de frappes toutes aussi rapides les unes que les autres. L'air tout autour de nous accusait le passage des coups, et des bourrasques de puissance soufflaient violemment entre les colonnes que contenaient la galerie qui nous servait de champ de bataille ! Sous nos pieds le long tapis rouge s'était déchiré tandis que le sol s'était affaissé.
En une synchronisation parfaite, nous bondîmes en arrière pour récupérer un peu de notre souffle.

- Du grand art ! exhalais-je.

- Tu as le mérite de savoir un peu te battre, répliqua Baddack. Mais tu manques encore d'expérience.

Effectivement, je m'en étais également rendu compte au terme de cette petite joute. J'avais le sentiment que Baddack ne s'était pas tourné les pouces, et ce depuis son plus jeune âge ! Sans doute que lui-même n'était pas capable de m'énumérer les champs de bataille qu'il avait foulés tout au long de sa vie.

- On en a jamais assez de toute façon, rétorquai-je. Mais si vous croyez que mon art se limite à ça, vous risquez d'avoir de très mauvaises surprises.

Je n'allais certainement pas jouer sur le même terrain que lui ; c'était un coup à me faire submerger par sa dextérité au corps à corps.

- Amusant ! Alors qu'est-ce que tu attends pour me montrer ce dont tu es réllement capable ?

- Vous allez être servi~

- HA !

Il plia les genoux et libéra son aura qui se mit à flamber de tous les côtés !
Dans mon cas, ce fut tout l'inverse : animée par un subtil mélange de Ki et de magie, elle se matérialisa autour de ma silhouette sous forme de volutes composées de diverses nuances de violet.
Je m'étais plongée si profondément dans le Cœur de pierre qu'il avait affecté jusqu'à la consistance même de mon aura.

- Me voici.

Concentrée comme je l'étais, mes mouvements devinrent tout de suite moins amples et bien plus précis. En dosant méticuleusement ma vitesse, je parvins à me rapprocher de Baddack si vite qu'il manqua ne pas me voir venir ; il tourna brusquement son regard sur moi et bloqua ma percussion avec son avant-bras - plus par réflexe qu'autre chose. J'eus la satisfaction de le voir serrer les mâchoires avant de continuer à attaquer ! Pour ce faire, je pivotai sur un pied afin de lui porter un coup de coude dans le dos, juste sous l'omoplate. Il para encore en se contortionnant, mais j'en remis une belle couche avec un petit coup de pied derrière le genou. Cette fois-ci, je l'entendis grogner.
J'aurais pu continuer à le frapper en profitant ainsi de sa très légère perte déquilibre mais je ne le fis pas. Au lieu de ça, j'entamai quelques pas qui, de part leur grâce, me donnaient l'impression d'être davantage en train de danser que de combattre.
Quand Baddack voulut contre-attaquer avec son ardeur et sa réactivité habituelles, il tomba dans le piège ! J'avais pris mes marques, si bien qu'il ne comprit pas que je cherchais depuis le début à le feinter. Après l'avoir lue, Je m'étais donc écartée de la trajectoire de son poing avant de porter un coup en travers du plexus de son propriétaire.
Les yeux ronds et le souffle coupé malgré la présence de son armure, il tituba en avant. Un pas, puis un second...
Je ne lui laissai pas le temps d'entamer le troisième ; d'un coup de pied sauté entre les vertèbres, je l'envoyai s'écraser contre un pilier, qu'il brisa en passant au travers !

- GUAAAH !

Alors qu'il était déjà en train de se relever, j'avais repliée une jambe pour me tenir debout sur un unique appui, les mains occupées à dessiner quelques arabesques dans les airs.
Je m'interrompis en apposant le flanc de mes doigts tendus contre le bout de mon nez, pouce tournée vers mon visage. Mon entrainement passé dans le domaine du Maître, à travailler mon équilibre sur le champ de poteaux que j'avais moi-même plantés, n'allait pas finir aux oubliettes de si tôt !

- Un problème, Monsieur Baddack ?

Il me regardait avec de la colère dans les yeux.
Bonjour le sang-froid, même chez ce formidable combattant !
Laissant les quelques vestiges du pilier derrière-lui, le fier Saiyan brisa la distance qui nous séparait en un temps record. Je fléchis sur ma jambe pour me projeter dans les airs au tout dernier moment.
Sans jamais me quitter des yeux, Baddack interrompit brusquement sa charge, le buste légèrement tourné dans un sens avec un bras replié en arrière - je le voyais faire depuis ma position aérienne, tout comme je me rendis compte très vite qu'il comptait m'atomiser avec une bonne grosse décharge de Ki.

- Tu ne t'échapperas pas si facilement ! rugit-il. Ha !

Alors qu'il voulait ramener sa main en avant, je mis à profit le piège que j'avais silencieusement préparé - Baddack, de toute évidence peu habitué à affronter des pratiquants de la magie, avait sauté à pieds joints dessus.
Une pression jusqu'alors invisible lui maintint les coudes collés contre ses flancs. Entre mes doigts, j'avais tissé un fil en Tisse-Rune plus solide et plus souple que n'importe quel métal présent dans la couche terrestre de notre bonne vieille Terre. Et ce même fil s'était enroulé autour des bras du guerrier.
L'attaque explosive de Baddack fut avortée.
Il jura entre ses dents.

- Si je suis ici c'est aussi pour vous faire face !

Reliée à mon captif par le fameux fil, je me projetai sur lui à toute vitesse, une jambe tendue !
Il n'eut pas le temps de se débarasser de son entrave de quelque manière que ce fût : la semelle de ma botte s'enfonça dans son plastron et lui arracha un cri rauque.
Tout juste après m'être receptionnée au sol, je sectionnai immédiatement le fil en Tisse-Rune. Baddack vola en arrière, les membres relachés... puis avec un remarquable effort de conscience et contre toutes mes attentes, il se mit en boule et continua sa course plus loin.

- Waowh !

Il m'était carrément passé au dessus de la tête pour atterrir à trois mètres de distance derrière moi.
Belle prouesse accrobatique !

- Puisque c'est comme ça, fit-il dans la foulée, je ne te laisserai pas le temps d'user de tes trucs !

Il revint au corps à corps en me balançant un coup du tranchant de la main, que je parvins à éviter de justesse rien qu'en me baissant. Il enchaîna directement par un coup de genou. Celui-là, je pus le dévier du dos de la main avant de répliquer par un coup de pied circulaire en travers de la cheville. Ma tentative pour l'estropier échoua et je fus punie quand il déplia son autre jambe. Mon épaulière en fit les frais, mais je fis bon usage de cette bousculade avec une volte qui se termina par un coup de talon fouetté, que Baddack contra avec son avant-bras gauche.
Le choc résultant eut le mérite de le déstabiliser un peu.
Remarquant cette légère ouverture, j'ouvris la main droite à hauteur de son visage. Un Satelles de taille moyenne naquit et fit la rencontre avec l'une de ses dangereuses déferlantes de Ki.
L'explosion qui eut lieu suite à cela nous propulsa tous les deux en arrière.
Avant même de toucher terre, je m'empressai de porter deux doigts contre mon front et de recourir au Shunkan Ido !
J'apparus dans le dos de Baddack alors qu'il s'était à peine redressé, les jambes encore à demi-pliées.

- Que... ?!

Cette fois-ci, mon second Satteles - un peu plus petit que le précédent - le frappa de plein fouet - juste sous son bras droit !
Et juste avant qu'il explose...

- Praesidium !

...Ma protection fétiche apparut comme par magie, m'épargnant des dégâts supplémentaires.
Elle se brisa une fois que la détonation eut lieu. Devant moi, une partie du tapis rouge avait été vaporisée tandis que le sol s'était enfoncé.
Baddack, le corps encore fumant, avait maintenant un gros trou dans sa cuirasse.
Il me regardait en montrant les dents, une expression de douleur très difficilement dissimulée sur son visage.

- On dirait bien que je suis finalement parvenue à vous surprendre, monsieur le vétéran !

- Tch... Il faudra bien plus que ça pour me mettre à terre !

J'en avais parfaitement conscience, seulement...
Sans prévenir, il bondit en avant et me tira un énorme rayon de Ki !
Je me jetai sur le côté à l'aide d'une roue acrobatique pour l'éviter. Baddack, plus preste encore, profita du fait que j'étais en train de me rétablir en m'administrant une balayette ! Je chus sur l'épaule et il choisit ce moment propice pour abattre son poing sur moi.
En soufflant mon incantation d'immobilité parfaite - Gratia ! -, je pointai un doigt en direction de son front !
Alors qu'à la surface de sa peau les symboles cabalistiques salvateurs étaient apparus, son poing se figea à deux centimètres de mon visage.
Je roulai trois fois sur moi-même pour battre judicieusement en retraite.
Dans mon dos, un vacarme assourdissant résonna dans la galerie.
En reprenant son geste là où je l'avais arrêté par la seule force de ma magie, Baddack avait créé un énorme cratère à ses pieds.
Il s'en était fallu d'un cheveu pour que je remplace le pauvre tapis rouge qui s'était trouvé là.

- Quelle frayeur !

Sous le regard inquisiteur de Baddack, je bondis sur mes pieds, plus motivée que jamais.

- Vous ne me maissez pas le choix, lui dis-je. Je vais devoir monter d'un cran !

- Comment ?!

Le Cœur de pierre céda sa place au Cœur de Glace. Ce fut à mon tour de me voir recouverte de tatouages lugubres, bien qu'ils n'aient pas le même effet que ceux apparus sur mon redoutable opposant - j'étais maintenant deux fois plus forte que lui !

- Et cette fois-ci, il n'y aura pas de statut quo !

Je frappai le sol du pied en l'infusant des pouvoirs de la Pierre Philosophale - ou de la Manipulation Minérale Magique, si vous préférez - pour qu'il se mette à onduler. Même pour un guerrier de renom comme Baddack, il lui était impossible de se battre sur un support aussi instable ! Par contre, ce n'était pas mon cas ; moi qui avais parfaite connaissance du sinusoïde dessiné par les mouvements de vague liés à mon sort.

- Bordel ! jura le guerrier avant de se mettre à léviter.

Si prévisible !
Grâce au cœur de Glace, je traçai la Rune Berkano en un tourne-main, puis l'activai aussitôt. Une ronce jaillit du symbole magique et s'enroula autour de la cheville exposée du Saiyan. En tirant sur l'extrémité de ma dernière création, j'obligeai Baddack à redescendre sur terre - dans tous les sens du terme.
A sa mine renfrognée, je répondis par un petit sourire en coin.

- Vous voilà devenu bien faible, tout à coup, Monsieur Baddack, lui fis-je remarqué alors que ses pieds s'enfonçaient « inexpicablement » dans le sol mouvant - dont j'avais modifié la consistance. C'est très ironique, vous ne trouvez pas ? Vous qui blâmez votre fils de ne pas être aussi doué que vous - en le considérant presque comme un rébut !

Enragé, il fit éclater sa puissance - et le sol piégé par la même occasion.

- Ne me fais pas la morale, sorcière !

Je fis la moue.

- Et dire que dans ma temporalité, une version de ce rustre m'avait demandé de l'épouser... C'est désolant !

- Je ne te laisserai pas l'ouvrir à nouveau ! beugla-t-il.

- Essayez toujours, le défiai-je.

Bien que détruite, la terre revint à la charge à la manière d'un raz de marée. Plus que contre moi, c'est contre l'un des éléments les plus résistants que Baddack devait se mesurer en cet instant !
Berkano brillait, son symbole runique toujours en suspension dans l'air.
Le Saiyan revêche allait s'en mordre les doigts !
Tandis qu'il cherchait à ne passe faire se faire gober, je pris la Rune à pleine main et l'enfonçai dans le sol. Les ronces qui se ruèrent à la rencontre de Baddack était aussi nombreuses qu'impressionnante de par leurs tailles.
Il y en avait trop pour que le guerrier puisse s'en sortir par ses seuls moyens.
Tandis que mes végétaux acérés frappaient Baddack de tous les côtés, je recouvris ma main libre d'une fine couche de Ki conformément à l'invocation du Discidium.

- A mes yeux, ceux qui naissent faibles et qui parviennent - ou cherchent par leurs efforts - à dépasser leur condition méritent bien plus de respect que ceux dont le talent est inné, et qui n'ont de ce fait pas eu grand chose à faire pour grimper les échelons.

N'ayant plus besoin de garder les doigts serrés sur la Rune Berkano, j'extirpai ma main du sol meurtri. Autour de nous, la galerie n'était plus qu'une horrible plaie. Une balafre au milieu au milieu d'un temple sacré.
J'espérais bien qu'une telle vue rendrait le roi fout de colère~
Mais pour l'heure, il fallait que j'en termine avec son champion.
J'avais adopté une position basse, prête à fondre sur ma proie comme un rapace !
Et comme pour rendre mon Discidium plus affûté qu'il ne l'était déjà, je fis glisser mes doigts sur sa surface étincelante de Ki avant de ramener ma main d'arme en arrière...
Un petit rire m'échappa : en un instant - à peine le temps d'un battement de cil - , j'avais porté mon coup d'estoc et dépassé Baddack.
Plus loin dans son dos, je baissai alors la main qui venait de le frapper....
Lorsque ma lame d'énergie disparut, les genoux du guerrier vaincu cédèrent puis claquèrent contre le sol qui avait cessé de remuer. Tout comme l'armure de Radditz, la cuirasse de Baddack vola en éclats !
Je n'avais pas besoin de me tenir face à mon adversaire pour me rendre compte que mon attaque avait porté ; sur le torse nu du combattant, quelques entailles d'où perlaient un peu de sang formaient un « R ».
Oui, j'avais marqué le saiyan à la pointe de mon épée magique, d'un « R » comme « Ryanne ».
Avant de m'en aller en direction de la salle du trône, je lui glissai par-dessus mon épaule :

- Je plains votre fils, qui jusque-là n'a vraisemblablement eu le droit qu'à du fiel en guise d' « encouragements ». J'espère bien que de cette défaite vous sortirez un peu plus malin ! Le découragement est la mort morale, Monsieur Baddack ! Souvenez-vous en~

Un petit geste de salutation de la main à son attention et je me retrouvais au bout de la galerie, à pousser les doubles portes chichement ornées qui allaient sans doute me mener jusqu'au roi à queue de singe.