Spoiler:

Je fis ma subite apparition dans un environnement exotique, au sein d'une petite maison dont les fenêtres grandes ouvertes donnaient sur le sable et l'océan.
Derrière-moi, une petite musique rythmée, propre aux émissions télé' basées sur de la simple gymnastique, se jouait par-dessus le chant cacophonique de quelques mouettes apeurées.

- Ho ho ho !~

- Allez, tous avec moi ! Un-deux ♪ Un-Deux ♪ Un-Deux ♪ Encore une fois !...

Le vieux maître était là, devant son poste de télévision bruyant, ses yeux cachés par de grosses lunettes de soleil braqués sur l'écran. Béat d'admiration, la bouche grande ouverte devant de jolies filles en tenue de fitness, il avait l'air franchement captivé...
Penchée derrière le seul canapé de la maison, j'étais occupée à me demander si c’était l'exercice en lui-même qui le fascinait autant ou bien les sportives qui s'y adonnaient lorsqu'une torture, en proie à la panique, fit irruption dans la pièce, hurlant qu'un danger sans pareil lévitait au-dessus de la maison.
Le vieux reptile se figea en se rendant compte de ma présence.

- Mais... mais q-qui êtes-vous ?! D'où venez-vous ?!

- Hein ? fit le vieil homme, qu'on avait arraché à son délicieux programme. Qui ça qui quoi ? Ooooh ! Mais qui vois-je ?~

J'eus la vague impression de reconnaître un soupçon de lubricité derrière ses épaisses lunettes teintées. Passant outre cette supposition plutôt hasardeuse, je levai les mains devant moi pour leur faire signe à tous les deux que je ne leur voulais absolument aucun mal.

- Vraiment navrée de m'être introduite dans votre humble demeure, chers résidents, mais nous avons affaire à une urgence !

Et là, j'eus comme un sursaut d'intelligence : comment cela se faisait-il que le vieux bonhomme barbu n'avait pas été averti de la menace qui planait sur sa tête alors qu'il se trouvait encore devant la télé à mon arrivée ?
Cela avait sans doute un rapport avec les deux forces qui se trouvaient au-dehors. L'une d'elle n'avait pas du tout l'air de plaisanter !
Peut-être brouillait-elle la réception du vieux téléviseur, empêchant ainsi l'alerte du Wolfpack de lui parvenir ?
Les craintes de la tortue étaient plus que fondées.

- Et quel genre d'urgence me vaut une si charmante compagnie ?

- Vous ne m'avez pas entendu ou quoi ?! rugit la torture, deux fois plus paniquée. Il y a un vaisseau alien juste au-dessus de nos têtes qui pointe un canon droit sur nous !

Stressée au possible, elle s'exprimait tout en brassant l'air avec ses grandes nageoires.

- L’île va partir en cendres, Maître Tortue Géniale !

Pendant qu'ils se chamaillaient, je m'approchai de la fenêtre pour jeter un coup d’œil dans le ciel. J'eus aussitôt un visuel sur nos ennemis. L'un d’eux, armé d'une lance, portait un capuchon des plus sinistre. L'autre était... plus gros ? plus impressionnant ? Tout autant démoniaque ! Il s'agissait du vaisseau, en l'occurrence, et quelque chose me disait qu'il ne servait pas qu'au transport d'assassin.
L'appareil s’apprêtait à faire feu.
Je me détournai de la fenêtre pour rejoindre la tortue bavarde et son Maître douteux, qui n'avait pas du tout l'air de me craindre. Il avait brusquement levé le menton et modifié la trajectoire de son regard - qui, curieusement, avait donné sur mes hanches - pour me regarder droit dans les yeux, l'air de rien.

- Je n'aurais jamais cru dire ça un jour mais nous n'avons pas le temps de bavasser !

D'un geste vif, je saisis le vieil homme par le col de sa chemise tout en posant une botte sur la tortue douée de parole. Avant que l'un ou l'autre puisse émettre des protestations, j'appliquai deux doigts sur mon front en me concentrant sur l'esprit de l'homme encapuchonné.
En une fraction de seconde, nous fûmes tous les trois dehors, dans les airs, non loin du vaisseau alien - et un peu au-dessus.

- Qu-waaaaaaaaaaah ?! *Splouf!*

C'était la Tortue qui venait de tomber à l'eau.
Un autre petit bruit de chute dans l'océan s'ensuivit.
C'était une sandale du vieil homme, que je tenais maintenant par la carapace – bien plus lourde qu'elle n'y parait! - qui avait aussitôt rejoint la Tortue dans son vaste milieu aquatique.
Le vieux maître battait nerveusement des jambes et, mal à l'aise, n'avait pas l'air de savoir voler.

- Qu'est-ce que t-... ? Fais-moi descendre !

- Je regrette mais c'est non, lui répondis-je calmement. Pas pour le moment...

J'observai intensément le démon à la lance et levai une main pour la pointer sur son vaisseau.
Par non-respect pour l'être en question, j'attirai son attention avec un bref sifflement.

- C'est par ici que ça se passe, déclarai-je. Et je vous déconseille sérieusement de faire feu, ou le retour de bâton risque d'être très salé.

Afin de me montrer plus éloquente quant à ma menace, je fis jaillir mon aura mauve et me plongeai directement dans le Cœur d'Améthyste, arborant ainsi une chevelure blanche comme la neige et des prunelles ambrées.
En vérité, je ne comptais pas laisser le canon cracher son feu, car plus que cette île c'est la planète entière qui en souffrirait.

Action à prendre en compte:

Le souffle de mon aura agitait la surface de l'océan que nous survolions au même titre que les feuilles des palmiers présentes sur l'île du vieil homme, que je gardais suspendu par le rebord supérieur de sa lourde carapace violette - excellent choix de couleur, au passage !
L'artiste martial aux lunettes de soleil et à la longue barbe blanche flottant au vent avait semble-t-il cessé de protester. Comme si la situation dans laquelle il se trouvait, face à cette machine de mort et à son propriétaire malsain, était suffisamment inquiétante pour l'encourager à se préparer au pire.
Je notai toutefois qu'à contrario de mon vis-à-vis armé d'une hallebarde de facture indubitablement démoniaque, le fameux Tortue Géniale ne paraissait pas affecté par la nature de ma transformation.
Peut-être que le fait de lui avoir permis d'échapper à un tir de canon mortel, à lui et à sa torture bavarde, n'y était pas pour rien dans son jugement implicite ?
Pour ma part, je devais me soucier davantage de l'envoyé du Royaume des Démons plutôt que des pensées du vieil homme. Et dans un sens, le tenir à bout de bras lui interdisait physiquement de me reluquer en toute impunité ; il aurait fallu qui se rompe le cou pour pouvoir profiter du spectacle.

Bref ! Alors que je gardais toujours une main tendue vers son engin de mort, le démon eut le bon sens de répondre à mon interpellation.
Sauf que le "mon enfant" était vraiment de trop dans sa logorrhée ! Je veux bien paraître jeune en comparaison d'un humanoïde qui ne craint pas les affres de temps - ou très peu ? - mais de là m'affubler d'un tel sobriquet...
Même le Maitre ne s'est jamais permis de me l'associer !
J'eus une brève grimace avant de hausser les sourcils en considérant... l'abjecte proposition qu'il venait de me faire : tuer l'être humain à qui je venais de prêter assistance pour obtenir davantage de pouvoir.
Je glissai un coup d’œil sur le vieil homme, qui ne semblait pas tendu par l'ignoble perspective que lui avait exposé indirectement notre ténébreux vis-à-vis.

- ...

Je finis par exhaler un profond soupir.

- Vu sous cet angle, c'est tout réfléchi.

Je relâchai subitement la victime tant désirée de ce cirque exotique. Incapable de voler comme je le suspectais, il se mit à chuter comme une pierre en poussant un petit cri de stupeur.
Mais avant même qu'il ne fasse le grand plongeon, j'avais moi-même pris les devants en allant à la rencontre de son assassin, la lame énergétique du Disidium déployée comme une extension de ma main droite, plus rapidement que de coutume grâce à ma métamorphose et à l'aura qui m'entoure - dont ladite lame est issue, pour le coup.
J’espérais bien découper sur place et d'un revers fulgurant et le démon et sa machine !
Entre-temps, grâce au miracle du Compartimentage de l'Esprit, j'avais suivi la chute du Vieux Maître et il ne me fallut qu'une pensée et un geste de ma main libre pour amortir sa descente à l'aide d'une bulle de télékinésie.
A l'intérieur de cette sphère hermétique, Kame Sennin se réceptionna sans encombre, et ressemblait presque à s'y méprendre à un hamster prisonnier de sa boule grandeur nature.
De cette façon, il pouvait se déplacer en toute quiétude à la surface de l'eau, avec une barrière susceptible de dévier bien des projectiles avant d'éclater comme un ballon de baudruche.
A mon avis, même mon entraîneuse en la matière, j'ai nommé la glorieuse Elwen, n'aurait pas eu idée de trouver pareil usage à son sort !

Actions à prendre en compte:

Spoiler:

Ryanne, un ; vaisseau démoniaque, zéro !
La machine endommagée creva la surface de la mer avant de s'y enfoncer comme un pierre. Je n'eus pas le besoin de lui couler un regard pour m'en rendre compte : le bruit faisait largement son office ! Entre-temps, j'avais aussi pourfendu son propriétaire. Sauf que de ma taille, aucune sensation ne résultait. On aurait pu appeler ça un "coup d'épée dans l'eau", car qu'elle ne fut pas ma surprise d'entendre la voix du démon surgir du néant alors que sa tête lui manquait.

- Tiens ? fis-je, intriguée par cette mise en scène plutôt réussie. Je ne dirais pas que c'est drôle mais... j'aurais pourtant juré avoir fait mouche.

Mes pronostics étaient au moins aussi mauvais que ceux de mon adversaire aux capacités insolites ; lui qui prévoyait mon trépas avec une voix lugubre, et forte d'une certaine assurance.
Par contre, le voir se "régénérer" ainsi était proprement stupéfiant ! Ce pouvoir me rappelait presque celui du Maître, ou devrais-je plutôt dire celui de sa toge en Tisse-Rune.
Le Démon usait d'une curieuse magie.
Je ramenai mon bras en arrière, la lame du Discidium disparaissant à cette occasion.
J'eus à peine le temps de me remettre en position que le hallebardier se mit à... parler à son vaisseau englouti ?

- Sans blague ? m'étonnai-je. Vous lui avez même donné un p'tit nom ?

Et au cas où vous vous le demandiez : non, je n'en avais pas fini avec la soit-disant machine de notre oiseau de mauvais augure !
Plusieurs mètres sous nos pieds, je sentis et vis émerger l'étrangeté du nom de Xamus. Cette chose n'était vraiment pas un modèle de beauté. Et par-dessus le marché, il émanait d'elle une puissance effroyable, oppressante !
Elle était en colère ; je voulais bien le croire.
En même temps, à défaut d'avoir entamé sa chair peu ragoûtante, je lui avais quand même découpé sa belle carrosserie. Maintenant, la créature se retrouvait complètement dénudée.
A sa place, j'aurais été gênée.
Surtout en présence du propriétaire de la petite ile, qui s'était éloigné du champ de bataille, enfermé dans sa bulle de magie. Il émettait des petits cris, en roulant sur l'eau comme une grosse bille. S'il ne vomissait pas avant que j'en aie terminé avec son assassin, pensai-je, ce serait miraculeux.
Je reportai immédiatement mon attention sur le gros œil menaçant.

- ...Xamus, c'est ça ? Enchantée ! Je m'appelle...

Mais le monstre n'était pas d'humeur à écouter mes présentations, et de toute manière je ne comptais pas non plus terminer ma phrase ; Le mot qui franchit le palier de mes lèvres ne fut pas mon nom mais bien celui de mon sort : le Praesidium.
Invoquée selon un certain angle, la carapace d'énergie alvéolée ne s'opposa pas au rayon : elle en détourna la trajectoire à l'impact. Le tir énergétique se perdit dans les cieux, puis dans l'espace, à la manière d'une étoile filante.

- Pas très commode comme familier, commentai-je en jetant un coup d’œil à la surface fissurée de ma protection, pour finir par relever les yeux sur le fautif. Ça mérite une bonne correction !

Je fermai le poing - de ma main que j'avais tendue pour provoquer l'apparition de ma protection magique - et, consciente de sa fragilité, la fit éclater en de nombreux éclats translucides.
En soufflant le mot Testa, ces projectiles acérés, comparables à de gros morceaux de verre tirant vers le violet, sifflèrent en direction de mes adversaires.
De cette façon, j'arrosai et le Démon à la lance et son furieux compagnon ! Avec bien sûr une petite préférence pour ce dernier, puisque l'infime partie de ma contre-attaque dirigée vers son maître - je suppose ? - ne sert qu'à le faire patienter un peu.

Résumé:

Mon averse de tessons magiques n'avait pas produit de résultat très probant.
L'infâme Xamus avait fait rempart de ses tentacules pour ne pas abîmer son si bel œil, de sorte à ce que seuls ses membres visqueux goûtassent à l'effet rasoir de mon attaque.
Je remarquai du coin de l’œil que son compagnon démoniaque n'avait même pas pris la peine d'esquiver ma dernière attaque. Son corps meurtri, lacéré, déchiré ou même découpé de tous les côtés ne souffrait plus d'aucune plaie l'instant d'après.
Un tel niveau de régénération ne peut tenir que du mythe, même aux yeux d'une Envoûteuse - encore en étude, je précise !
Et il n'a toujours pas attaqué. Ce qui prête à penser qu'il s'agit là d'une illusion. Ou d'une projection de sa silhouette qui a pour simple but de garder un œil sur sa créature.
Une façon sécurisante, et surtout très lâche, de tenir tête à ses adversaires.
Je ne pris pas la peine de le vanner à ce sujet : son fléau tentaculaire, enhardi par ses quelques entailles peu esthétiques, m'expédia ses appendices comme autant de balles de fusil !
Consciente qu'un attaque aussi basique n'avait que pour simple objectif de me déstabiliser, je ne commis pas l'erreur de danser dans les airs pour les éviter ; ce fut la Caladbolg qui, guidée par mon bras, débroussailla cette volée d'horreurs flasques pour la transformer en une averse de sang démoniaque malodorant.
Si je ne me trompe pas...
Et je me m'étais pas trompée !
J'eus le droit à un missile bien plus imposant que les précédents, à savoir le monstre lui-même qui avait troqué son œil diabolique pour une gueule garnie de crocs jaunâtres mais aussi aiguisés que des lames de rasoir.
Ah, ça par contre... Très charmante dentition !
Prévenue comme je l'étais, je parvins à éviter la charge de l'énorme monstre grâce à une petite figure acrobatique en looping pendant laquelle, au lieu de m'extasier comme une enfant dans un parc d'attraction, je m'étais mise à tracer la Rune Berkano à même la main !
Avant même que l'abomination dénommée Xamus mette un terme à sa course folle, j'ouvris ladite main dans son dos pour libérer, en vue de la transformer en passoire, une kyrielle de racines noueuses à pointes torsadées !

Résumé:

Un spectacle guère ragoûtant : mon attaque avait porté ses fruits. Et lesdites fruits, justement, ressemblaient à de la mauvaise guimauve ayant fermenté beaucoup trop longtemps dans un bocal.
Au bout de mon entremêlement de racines, Xamus était à ma merci, complètement impuissant après avoir un peu trop tenté le diable (très ironique pour un démon me diriez-vous, Ah ha !).

- J'imagine que ça doit gratter, n'est-ce pas ? Et pas de façon très agréable. Il aurait fallu y réfléchir à deux fois avant d'entreprendre un projet aussi délirant que celui de me gober comme une pauvre mouche !

Je m'apprêtais à donner l'ultime impulsion à mes racines profanes quand le maître de Xamus claqua des doigts et fit disparaître sa chose dans un nuage de fumée, à mi-chemin entre le rouge et le marron.
Tout en rétractant avec un calme souverain ma mortelle création, je tournai mon regard contrarié vers cet empêcheur de tourner en rond.

- Vous vous sentiez VRAIMENT obligé de me soutirer cet amuse-bouche ? le sermonnais-je. Nous étions sur le point de conclure, mécréant !

Un léger caprice de ma part, je l'admets. Mais n'oubliez pas que l'utilisation du Cœur d'Améthyste a ses petits effets secondaires sur mon comportement dès lors qu'il est actif : un coup il me rend froide, à d'autres occasions il peut me faire passer pour une insatiable adolescente en manque d'action.
Dans le cas présent, vous l'aurez remarqué : je tendais plus vers le second état.
Je haussai un sourcil neigeux lorsque notre rabat joie de service se mit à incanter, les bras levés au-dessus de sa tête.
Il prend le relais ET me prépare un sale coup.
Pas le temps de gazouiller ! Titillée par un trouble dans l'atmosphère, je levai les yeux au ciel sans me soucier du geste malpoli - il me pointait du doigt, le rustre! - de l'incantateur.
Alors qu'une forme commençait à se dessiner à partir d'un conglomérat de nuages à l’apparence orageuse, je recyclai mes racines à demi-résorbées pour un nouvelle usage. Il ne me fallut rien qu'une poussée d'énergie pour gonfler leur écorce d'une très épaisse mousse mauve, sous laquelle je fus preste à me réfugier !
L'énorme masse nuageuse descendit du ciel comme un gigantesque coup de marteau, et s'écrasa sans produire trop de bruit tout contre mon éponge de la taille d'un arbre. J'avais certes absorbé l'impact grâce à cette protection innovante mais la pression exercée dessus fut telle qu'elle m'expédia dans l'eau de mer.

- *Agloubh!*

Traduction : Sacré punch !
Une fois dans l'eau, je parvins à me dégager de mon condensé de mousse dans lequel je m'étais... avouons-le *sigh*... coincée les bras. Grâce à la Caladbolg, Je pus toutefois  débroussailler tout ce fatras avant d'espérer remonter à la surface, en me contentant simplement de nager.
Vous allez très vite savoir pourquoi~

Pas trop mauvaise en apnée, je m’estimais parfaitement capable de faire languir encore un peu notre sinistre assassin le temps que la Caladbolg fasse son office. Même son l'eau, je n'eus aucun mal à souffler le mot magique - Fractio ! - qui conféra à mon outil l'aspect d'une lame-fouet scindée en plusieurs morceaux acérés, eux-mêmes reliés par un flux immatériel et ininterrompu chargé d'éclairs.
Ayant conscience de la position de mon adversaire, le prendre par surprise derrière mon voile aqueux n'était plus qu'une formalité~
La Caladbolg modifiée creva la surface de l'eau tel un grand serpent marin pour s'enrouler autour du démon. Une action qui aurait autant le mérite de l'immobiliser que de le blesser.
Sauf s'il jouait encore la carte de la reconstitution instantanée. Auquel cas, là, ce stupide monstre m'entendrait le gronder pour sa fichue couardise !

Résumé:

Ah-ha ! J'étais parvenue à attraper le bien vilain poisson dans mon tout aussi terrible filet !
Je ressortis la tête de sous l'eau pour m'abreuver de ce spectacle. Et à vrai dire... je m'étais attendue à entendre un peu plus de cris jaillir de la gorge de cette infâme créature démoniaque. Ici, mon adversaire se contenta simplement de considérer ouvertement la Caladbolg comme une "arme embêtante...
Je me dandinais un peu dans l'eau, l'air désapprobatrice.

- Ooooh, rien que ça ? lui fis-je remarquer. Allons ! Ne soyez pas avare en grossièretés : ce n'est pas comme si ma lame ne pouvait pas vous entendre~

Oh que si, elle le pouvait !
J'en voulais pour preuve l'accentuation de son étreinte tout contre la silhouette déjà compressée du damné.
Mauvaise stratégie que de chercher à vexer mon épée~
Malheureusement, le démon parvint à lui échapper en se volatilisant sous la forme d'un nuage de poussière.
...Il n'y a décidément pas pire personnage que ceux capables de vous jouer ce genre de tours !

Je quittai sagement mon refuge aqueux tout en pestant intérieurement contre la fourberie de cet être perfide.
C'est alors que je remarquai quelque chose d'étonnant chez l'arme que mon adversaire à la consistance douteuse avait lâché : sur sa hampe, un œil avait fait son apparition. Pire encore : la lance ornée de runes cabalistiques possédait même une aura propre !
...Mais c'est bien sûr !
Je tapai mentalement du poing dans le plat de ma main.

- Eurêka ! m'exclamai-je, les sourcils rehaussés sous le coup de la découverte. Depuis le début l'outil n'est pas l'arme mais tout l'inverse : c'est l'arme d'hast elle-même qui contrôle l'enveloppe !

Une arme vivante ou maudite, en quelque sorte ?
Je l'entendis gronder son assaut en devenir d'une voix désincarnée. Tout à coup, le ciel s'était comme assombri tandis qu'un puissant vacarme courait dans mon dos, tel un mugissement semblable à la naissance d'une...

- Par ma lame, soufflai-je, la tête à demi-tournée, abasourdie par l'apparition...

D'une lame de fond !
Avec une franche montée d'adrénaline, je fis croître mon aura qui en conséquence de quoi émit un hurlement du tonnerre !
Mon énergie avait grimpé en flèche mais pas seulement pour me protéger de cette gigantesque masse d'eau à laquelle elle s'opposait : l'objectif était carrément de percer la vague pour espérer atteindre l'arme vivante.
En tout cas, c'est dans cet optique que je tendais la main au beau milieu de cet impitoyable courant.

Résumé:

La vilaine lance ne voulait vraisemblablement pas qu'on se serve d'elle impunément !
Alors que j'étais sur le point de l'attraper au vol, elle me fila entre les doigts...
Si mon adversaire avait été humain, je m'en serais franchement étonné ! Mais en l’occurrence il était question d'une arme douée de conscience, libre de ses mouvements, et qui ne faisait même pas la moitié de mon poids.
Aussi lorsque, en guise de représailles, elle me frappa de haut en bas je dus ma survie autant à mes réflexes qu'à l'esprit assaini qui abritait mon épée.
Sans l'intervention bienvenue de la Caladbolg, cette fiche arme d'hast extraterrestre m'aurait certainement tranché la moitié du tronc !
Au lieu de ça, je m'en sortais avec une belle entaille entre l'épaule et le cou au travers du tissu magique que composait ma précieuse tenue en Tisse-Rune.

- Je vous trouve bien asocial pour un outil, grimaçai-je, un brin dérangée par cette nouvelle et chaude plaie. Et pour info', je ne suis pas très lanc-

Pas le temps d'en finir avec ma phrase : le puissant courant marin se fraya un chemin à travers la flamme tourmentée de mon aura et me percuta de plein fouet, m'emportant - moi et moi seule! - dans les eaux agitées par son passage.
Mais si j'avais l'impression que mon corps tournait dans le tambour d'une gigantesque machine à laver, il n'en allait pas de même pour une infime partie de mon esprit, qui lui avait trouvé une petite place aux côtés de ma propre lame enchantée.
Cette dernière avait quitté ma main à la suite du dernier choc, non sans puiser sagement dans mon Ki avant de filer cette diablesse l'arme d'hast, nullement affectée par le passage de la lame de fond.

Comme je lui avais donné pour ordre de défendre une autre personne que moi, elle eût tôt fait d'intervenir aussitôt que la bulle protectrice avait cessé de jouer son rôle autour du Maître des Tortues !
Au moment où l'acier frappa l'acier, je pus me focaliser sur ma propre personne et quitter l'immensité océanique avec une célérité bien, bien supérieure à celle d'un dauphin.
Je mis encore moins de temps pour réapparaître entre mon épée, en plein duel de force, et le vieil homme aux lunettes de soleil, dont je saisis le poignet au vol afin de ne pas lui imposer un bain possiblement mortel - qui sait ce que cette arme maudite peut invoquer sous l'eau ?

- A cause de toi... grognai-je, mon aura violette se faisant de plus en plus agitée. Je suis trempée jusqu'à la culotte !

Et j'avais presque l'impression de l'avoir perdue en cours de route... Mais ça, mieux valait ne pas le dire en se tenant à proximité de ce vieillard lubrique.
Indignée par les évènements, mon aura détonna une bonne fois pour toute !
J'empoignai le manche de la Caladbolg et l'infusai d'une nouvelle dose - de magie ce coup-ci. Sa lame se vit aussitôt élargie par une belle couche d'énergie couleur lila ; et je me servis de son tranchant amélioré par le Discidium pour briser la lance sur toute sa longueur !
Je ne comptais pas laisser le dernier affront impuni, non.
Et je me fichais bien de savoir si l'arme d'hast serait encore capable de s'exprimer une fois que je l'aurais réduite en minuscules résidus métalliques.
Je ne me souciais pas non plus de ma douleur aux côtes et de ma respiration alourdie par cette dernière. Le choc avec la vague m'avait laissé quelques séquelles - deux ou trois côtes fêlées, au moins...

Résumé:

L'arme maudite se dissipa comme poussière au vent suite à la contre-attaque que je venais de lui faire subir. Mais avant de disparaître totalement et d'assainir le paysage marin par sa non-présence, elle eut la gentillesse de me mettre en garde sur le caractère temporaire de ma récente victoire.
Vraiment trop aimable ! Même si j'aurais bien aimé au fond qu'elle ne se défile pas dans la mort et me fournisse plus amples informations sur les conséquences futures de mon intervention.
Enfin ! on ne peut pas tout avoir~

- La vie EST temporaire, ma chère ! répondis-je avec un fin sourire. La suite au prochain épisode, donc. J'en frémis d'avance~

J’entendis un "plouf!", et me rendis compte en baissant les yeux que notre artiste martial centenaire était tombé à l'eau malgré les précautions que je croyais avoir prises.
Bah ! Comme ça il n'y avait pas de jaloux : nous avions tous les deux bu la tasse au moins une fois dans cette journée mouvementée.
Je me palpais les côtes en me retenant de grimacer.
Si je désirais pourvoir m'entretenir physiquement les jours suivants, il allait me falloir remédier à ces maux au plus vite. Et pour ceci : vive la sorcellerie !
Mais avant de me raccommoder, il me restait un vieux pervers à rapatrier sur son île.
Consciente qu'il jouissait d'une trop bonne vue depuis sa position basse, je vins à sa rencontre en prenant garde à conserver les pans de ma jupe collées à mes cuisses.

- J'aimerais vous dire que "je suis Ryanne Hilaris, votre humble serviteur !" mais il n'y a que mon nom qui est vrai là-dedans, vieux monsieur libidineux, sifflai-je. Ma culotte restera là où est sa place ! Alors épargnez-moi vos requêtes insensées et laissez-moi vous ramener chez vous. Je ne vous demande rien en échange si ce n'est un silence de cathédral pendant le voyage~
Ah ! Et prière de ne pas trop gesticuler.

Je m'attendais à ce qu'il ait les mains baladeuses, aussi pris-je mes précautions en utilisant le précieux savoir magique acquis auprès d'Elwen. Avec sa Télékinésie Zélodienne, je n'eus pas à prêter mon épaule au vieil homme : seulement à me tenir à bonne distance de lui juste au-dessus du niveau de l'eau jusqu'à destination.